PAU (AFP) — Le ministère public a requis vendredi, devant le tribunal correctionnel de Pau, la relaxe de René Marquèze qui a tué en 2004 l'ourse Cannelle, dernière ourse de souche pyrénéenne, estimant que le chasseur se trouvait, quand il avait ouvert le feu, en situation de "nécessité".
Le tribunal a mis son jugement en délibéré au 21 avril.
Après trois jours de débats difficiles sur les circonstances précises dans lesquelles Cannelle a été abattue, le procureur de la République a requis la relaxe pour René Marquèze, estimant qu'il se trouvait bel et bien en situation de "nécessité" au moment où il a abattu la dernière ourse de souche pyrénéenne.
Cette thèse, contestée par les parties civiles, a été constamment réitérée par René Marquèze, 65 ans, qui assure n'avoir tiré qu'en dernier recours, lors d'une partie de chasse au sanglier, après avoir cherché à se protéger lui-même de l'animal qui le chargeait.
M. Marquèze avait été mis en examen le 7 décembre 2004 pour "destruction d'espèce protégée" et comparaissait en correctionnelle au terme d'une procédure marquée notamment par l'annulation, le 6 avril 2007, d'un non-lieu rendu par le juge d'instruction de Pau en janvier 2007.
Le procureur Erick Maurel a estimé que "René Marquèze a bien commis l'infraction qui lui est reprochée" -celle d'avoir tué Cannelle-, mais il a ajouté, en s'appuyant sur les "seuls faits objectifs établis", que le prévenu n'avait pas commis de "faute" dans son activité de chasseur, au moment des faits.
Cette notion de "faute", qualifiée par M. Maurel de "clef de voûte du dossier", est celle sur laquelle se sont fondées les parties civiles pour tenter d'invalider la thèse de la "nécessité" invoquée par le chasseur, ce dernier étant passible de six mois de prison et de 9.000 euros d'amende.
Les avocats des parties civiles ont notamment insisté sur les avertissements qui étaient parvenus aux chasseurs, le jour même de la battue mortelle, quant à la présence de Cannelle et de son ourson dans la zone concernée, proche d'Urdos dans la vallée d'Aspe.
Témoins et experts ont décrit les "traces récentes" de Cannelle qui avaient été découvertes dans la zone tandis que Jean-Jacques Camarra, responsable à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), estimait qu'il aurait fallu dans ces conditions "renoncer à chasser", même sans interdiction formelle.
Le procureur de la République a souligné à l'appui de sa réquisition, à l'instar des avocats de la défense, le fait que la partie de chasse au sanglier incriminée s'était déroulée dans des conditions légales, "en un jour et en un lieu autorisés pour la chasse".
"Aucune recommandation explicite n'a été donnée ce jour-là pour ne pas chasser", a-t-il ajouté, craignant de voir René Marquèze transformé en "bouc émissaire" dans ce dossier où se joue, en présence de nombreuses associations de défense de la nature, "un véritable enjeu de société".
Un avocat des parties civiles avait appelé de ses voeux la reconnaissance de la responsabilité pénale du prévenu estimant qu'à défaut, "un permis de tuer l'ours serait délivré aux chasseurs".
La mort de l'animal avait provoqué une vague d'indignation en France, incitant le gouvernement à mettre en place un plan de "renforcement de la population d'ours bruns" dans les Pyrénées.